mardi 17 septembre 2013

La qualité de la langue





Qui aurait cru que la Montreal, Main and Atlantic Railway allait être un sujet de discussion en linguistique? Un article que j'ai récemment lu sur le site de la SRC (http://blogues.radio-canada.ca/surleweb/2013/07/08/la-montreal-main-and-atlantic-railway-critique-sur-la-toile/) traite d'un communiqué de presse de la compagnie où la qualité du français est, pour ainsi dire, douteuse. Voici l'extrait rapporté par Radio-Canada :

« Alors que l’enquête publique de la cause de l’accident a largement empêché MMA de terminer sa propre enquête, un fait qui a émergé est la locomotive du train de pétrole garé à la Station Nantes a été fermé ultérieur au départ de l’ingénieur qui avait manipulé le train de Farnham, qui a pu avoir eu comme conséquence la libération des freins à air sur la locomotive qui jugeait le train en place. »
Qu'est-ce que phoque?

Ça me rappelle les
manuels d'instructions qui accompagnent les meubles à monter soi-même ou les étiquettes de vêtements
« cheap »... On a tendance à pardonner à ces deux derniers puisque leur importance est quelconque, on en rit, mais dans le cas d'une compagnie qui est dans l'eau bouillante comme la MMA, c'est presque de l'ordre du mauvais goût. On aurait pu espérer que les rédacteurs de la MMA, ou les traducteurs, se forcent un peu et envisagent l'impact d'un tel faux pas. Il ne s'agit pas ici « d'insérer le boulon en la vis » pour monter une table IKÉA, de « faire attention aux écrous » dans un sac de mélange du randonneur ou de « polir » une saucisse polonaise... Il s'agit d'une compagnie de trains, responsable d'une des pires tragédies ferroviaires, qui ne se force pas plus que ça pour s'expliquer dans un français
« correct ». Elle s'est reprise en corrigeant l'extrait, mais l'erreur est déjà faite et la crédibilité de la MMA (déjà mourante) en a pris un sacré coup.

La qualité de la langue n'est pas seulement l'enjeu de la traduction, elle l'est également de la communication dans notre langue maternelle, le français. Beaucoup de compagnies et surtout de sites Internet de compagnies (pour en avoir vus) ne passeraient pas leur épreuve uniforme de français. J'ai eu récemment à corriger un site dont les textes avaient été composés par les employés eux-mêmes. Ceux-ci croyaient que leurs textes seraient révisés avant que le tout ne se retrouve en ligne. Le propriétaire de la compagnie a remis les textes à la boîte créatrice du site en question en pensant lui aussi que les textes allaient être révisés avant que le site ne soit accessible... Et la compagnie a pris les textes en pensant que la révision avait déjà été faite, car elle n'a pas spécifié dans son offre de service que la révision linguistique n'était pas incluse, et les a mis en ligne. Je ne sais pas pendant combien de temps le site a été dans cet état avant qu'on fasse affaire avec moi, mais j'espère que le tout n'a pas fait trop de dommages.

N'oublions pas que lorsqu'on parle de qualité de la langue, on ne parle pas juste de l'orthographe. Un « s » oublié par-ci, par-là peut passer inaperçu, mais lorsqu'on parle de qualité de la langue, il est également question de la syntaxe. Imaginez une vingtaine de textes écrits par 10 personnes différentes qui n'ont aucune expérience en rédaction (car il ne s'agissait pas d'une boîte de communication, mais bien d'une compagnie qui œuvre dans le domaine de la santé) et qui ont oublié la notion de « relecture » en composition. Bref, il y avait des problèmes majeurs de syntaxe, sans oublier le manque total de conformité entre les textes, en plus des nombreuses fautes d'orthographe et de grammaire. Le tout était très difficile à lire. Et la cerise sur le gâteau a été qu'il y avait également des erreurs dans la structure même du site Internet : des onglets qui ne rapportaient pas à la bonne section, des pages en double, des erreurs dans les coordonnées de la compagnie et j'en passe. De quoi donner bien des maux de tête à un propriétaire de compagnie qui voulait se donner plus de visibilité en créant un site Internet.

Bref, on peut massacrer la langue comme on veut, mais celle-ci saura toujours se défendre en massacrant notre crédibilité...



1 commentaire:

  1. "Bref, on peut massacrer la langue comme on veut, mais celle-ci saura toujours se défendre en massacrant notre crédibilité..."
    très bien dit!!!

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